Des producteurs, transformateurs des filières lait et aviculture, des représentants d’associations de consommateurs ainsi que des chercheurs sénégalais ont récemment effectué une visite d’échange à Braunschweig (Brunswick), en Allemagne.Cette mission s’inscrit dans le cadre du projet IMMPEX : « Impacts des exportations de viandes et de produits laitiers sur les pays en développement ». Ce projet est rattaché au Programme fédéral pour la gestion durable du bétail inscrit dans la Stratégie d’élevage du Ministère fédéral allemand de l’Alimentation et de l’Agriculture.L’initiative, menée en partenariat avec l’Institut Thünen d’analyse des marchés et l’Institut Thünen d’économie agricole, vise notamment à étudier les effets des exportations européennes — et plus particulièrement allemandes — de viande de volaille et de produits laitiers sur les secteurs agricoles du Ghana et du Sénégal.Cette visite fait suite à un atelier tenu à Dakar entre 2019 et 2020, qui avait réuni des acteurs des filières lait, aviculture, cuir et peaux, des membres d’associations de consommateurs (notamment l’AFAO et l’IPAS/FAFA), ainsi que des chercheurs. C’est véritablement la continuité de Dakar à Braunschweig pour cette initiative .À l’issue de cette rencontre, plusieurs participants sénégalais avaient été sélectionnés pour participer à un atelier similaire en Allemagne.Ce séjour a permis aux participants non seulement d’assister à un atelier de deux jours avec leurs homologues ghanéens, mais également de visiter des fermes laitières, des élevages avicoles (bio et conventionnels) ainsi que des boucheries modernes, et de dialoguer avec des producteurs allemands sur leurs pratiques.Un témoignage fort de Mme Aïcha Sow membre du Collège des Transformateurs de Lait du Sénégal, qui s’est dite particulièrement satisfaite de cette expérience enrichissante. Elle a souligné avoir été impressionnée par les fermes laitières allemandes, très vastes, abritant entre 300 et 500 vaches, ainsi que par des exploitations agricoles de plus de 500 hectares servant à la production de fourrages comme le maïs, la betterave et les oignons pour l’alimentation du bétail.« C’est une véritable démonstration de l’intégration agriculture-élevage et de la vitalité des deux secteurs en Allemagne », a-t-elle déclaré.Elle a également salué la présence d’abattoirs modernes et de boucheries spécialisées dans la volaille, souvent gérés directement par les aviculteurs, qui produisent du poulet bio tout en cultivant les aliments nécessaires à leur élevage. « Ce voyage nous a permis de constater que les producteurs allemands vivent décemment de leur travail. Il est clair que la mutation des exploitations familiales vers des structures industrielles est possible. »Comparant cette réalité à celle du Sénégal, Mme Sow déplore un certain retard :« Malgré les efforts consentis, nos filières peinent à décoller au bénéfice des producteurs. Nous devons changer de mentalité et de comportement pour valoriser nos productions. »Elle a particulièrement apprécié la diversité et la qualité des infrastructures visitées et insiste sur la nécessité pour les éleveurs sénégalais d’adopter une culture agricole, notamment fourragère, pour assurer une meilleure alimentation du bétail :« L’agriculture et l’élevage sont deux poumons indissociables. Leur intégration est la clé pour améliorer durablement les productions animales. »Ce projet IMMPEX (2019–2022) pour documenter, comparer et proposer, intervient dans un contexte de critiques croissantes concernant les exportations européennes de produits d’élevage vers l’Afrique. Il vise à répondre à des interrogations sur la nature de ces exportations, leurs volumes réels et leurs impacts sur les marchés locaux.Dans ce cadre, plusieurs tables rondes sont organisées pour rassembler données, témoignages et expertises sur les enjeux actuels liés à la production et à l’importation de produits laitiers et de volailles au Sénégal et au Ghana. Ces discussions englobent toute la chaîne de valeur, des producteurs aux consommateurs, tout en prenant en compte les politiques publiques en vigueur.Le Sénégal et le Ghana ont été choisis comme pays d’étude pour l’analyse des chaînes de valeur, ainsi que pour évaluer les préférences des consommateurs locaux.Les partenaires scientifiques du projet sont constitués de deux instituts allemands jouant un rôle central dans ce projet : L’Institut Thünen d’analyse des marchés, relevant du ministère allemand de l’Alimentation et de l’Agriculture, assure l’étude des dynamiques de marché ;L’Institut Thünen d’économie agricole se penche sur les effets des évolutions économiques et politiques sur les exploitations agricoles, et sur les implications socio-économiques des adaptations opérées par les agriculteurs.Babacar SèneJournal Agropasteur