
En rencontrant des agriculteurs à Bicol au début de cette année, nous avons entendu un message clair : « Nous subissons de nombreuses pertes après les catastrophes ; une assurance agricole fiable pourrait être notre filet de sécurité financière », disent-ils. En 2023, la région a connu des inondations et des glissements de terrain dévastateurs.
Quelques années plus tôt, le super typhon Goni avait ravagé la région de Bicol, détruisant récoltes et bétail. De tels événements sont monnaie courante aux Philippines, où l’on compte en moyenne 20 typhons par an, dont 8 à 9 touchent terre. 1 L’agriculture est le secteur qui subit les pertes les plus importantes à la suite de catastrophes aux Philippines, 2 et les catastrophes climatiques sont responsables de la plupart des dommages causés aux agriculteurs. 3
Après ces chocs, les agriculteurs ont besoin de financement pour se remettre sur pied. Ils peuvent utiliser l’épargne et le crédit, ainsi que l’assurance, pour gérer ces chocs. Cependant, moins de 3 agriculteurs sur 10 aux Philippines ont accès à des comptes d’épargne ou à un crédit formel. Le secteur agricole n’a reçu que 2,6 % du total des prêts en cours du secteur bancaire philippin en 2022, alors qu’il représente 8,9 % du PIB et près d’un quart de l’emploi total du pays.
En outre, les indemnités versées par les assurances aux agriculteurs, même si elles sont assurées, sont insuffisantes et ne couvrent même pas le coût des nouvelles semences et des engrais. En l’absence d’accès au crédit formel (aggravée par l’absence d’assurance adéquate pouvant servir de garantie), les agriculteurs nous ont expliqué qu’ils doivent parfois faire appel à des usuriers informels, qui pratiquent des taux d’intérêt très élevés, et qu’ils renoncent souvent à la totalité de leur récolte pour rembourser leur prêt. Cela perpétue un cercle vicieux de pauvreté dont il est difficile de sortir.
Les résultats d’une étude de la Banque mondiale annoncent t qu’aux Philippines, la fourniture d’assurances agricoles est confrontée à des défis majeurs, selon une étude de la Banque mondiale. Ces défis se situent dans divers domaines, notamment au niveau des produits d’assurance existants qui ne conviennent pas à la plupart des agriculteurs, car ils sont coûteux à administrer et ne reflètent pas les pertes subies par les agriculteurs. De nouveaux produits sont nécessaires pour les petits exploitants agricoles vulnérables aux Philippines (plus de la moitié des agriculteurs philippins possèdent moins d’un hectare de terre).mais aussi au niveau des opérations où la Philippine Crop Insurance Corporation (PCIC) a travaillé dur pour obtenir de meilleurs résultats pour les agriculteurs, mais elle est confrontée à des défis opérationnels critiques. Depuis 40 ans, la PCIC est en fait le seul fournisseur d’assurance agricole (en tant qu’unique entité pouvant bénéficier de subventions gouvernementales sur les primes).
Une grande partie de ses opérations repose encore sur des documents papier et la gestion des sinistres n’offre pas un bon rapport qualité-prix aux agriculteurs. La PCIC ne dispose pas des outils nécessaires pour gérer efficacement ses risques importants. Sans réassurance, par exemple, la PCIC pourrait être confrontée à des problèmes de solvabilité en cas de catastrophe majeure. Les agriculteurs et le gouvernement seraient alors vulnérables et exposés aux conséquences financières d’une telle catastrophe.
Au niveau du Soutien public le gouvernement alloue un budget conséquent et croissant aux subventions de primes pour protéger les agriculteurs contre les événements imprévus. L’assurance agricole aux Philippines est en fait l’un des programmes les plus subventionnés au monde. Cependant, les subventions ne sont pas correctement ciblées : seul un tiers des agriculteurs du pays sont assurés, et ce ne sont pas toujours ceux qui ont le plus besoin d’aide.
Pour le gouvernement et la PCIC, comme pour de nombreux pays de la région, l’amélioration de la protection des agriculteurs aux Philippines est une priorité. Des réformes sont déjà en cours pour améliorer la fourniture d’assurance agricole, menées par le ministère des Finances (DOF) et le ministère de l’Agriculture (DA). Dans le cadre de l’une des premières réformes, le DOF a demandé à la Commission des assurances de superviser la santé financière de la PCIC. Cette réforme est essentielle pour assurer la protection des consommateurs et gérer efficacement le risque que la PCIC présente pour le gouvernement. Le conseil d’administration de la PCIC, sous la direction du DOF, prépare des révisions de la charte de la PCIC pour améliorer le ciblage des subventions aux primes, prévoir des partenariats public-privé dans l’assurance agricole, faciliter de nouveaux produits et améliorer les opérations de la PCIC. Le DOF a également mis en place un groupe de travail technique pour superviser les réformes visant à améliorer la fourniture d’assurance agricole.
D’où la nécessité impérieuse de mettre en place des réformes essentielles dans l’assurance agricole dont les plus nécessaires se situent à trois domaines essentiels, notamment la protection des agriculteurs par de meilleurs produits qui les aideraient à se relever après les catastrophes climatiques : le travail important que devra mener le Gouvernement en travaillant avec la PCIC sur le développement de nouveaux produits d’assurance agricole spécifiques pour différents types d’agriculteurs, allant des petits exploitants aux entreprises agricoles commerciales. L’adoption de la technologie sera essentielle, par exemple l’utilisation de données satellitaires pour évaluer les pertes ou déterminer les indemnités d’assurance de manière peu coûteuse, transparente et rapide.
La mobilisation du Secteur Privé avec la réforme de la PCIC qui permettra d’accroître l’efficacité et l’efficience de la fourniture d’assurance agricole aux agriculteurs ; la mobilisation du secteur privé pour la fourniture d’assurance agricole est essentielle.
Le secteur privé peut apporter son expertise, ses innovations et son efficacité. L’expérience du monde entier – notamment en Espagne, en Thaïlande et en Turquie – montre que le partenariat public-privé peut contribuer au développement d’un marché d’assurance agricole efficace et à grande échelle. Dans le même temps, la PCIC doit entreprendre des réformes dans ses fonctions principales pour établir une base solide de collaboration avec le secteur privé.
Et enfin un troisième niveau de réforme avec une réglementation adéquate qui faciliterait les réformes et augmenterait les chances de leur réussite : les marchés de l’assurance agricole ont besoin d’un environnement favorable. Cela implique d’établir un nouveau cadre juridique et de réformer simultanément le ciblage des subventions pour garantir que l’aide parvienne à ceux qui en ont le plus besoin.
Grâce à ces améliorations, l’assurance agricole peut devenir un outil essentiel pour les agriculteurs philippins afin de gérer efficacement les chocs climatiques. Elle peut protéger leurs moyens de subsistance, les protéger de la pauvreté, améliorer leur productivité et leur innovation, et contribuer à l’amélioration générale de la sécurité alimentaire aux Philippines. Babacar sene Journal Agropasteur/babaclimat (source « Réforme de l’assurance agricole aux Philippines – Rapport technique et recommandations